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Exemples d’exposants mesurés et leur comparaison à KPZ, avant et après renormalisation
Les chemins hamiltoniens sur réseau, qui sont forcés à visiter sans recoupement tous les sites du réseau, constituent un modèle statistique critique où les contraintes géométriques sont particulièrement fortes. Une équipe de l’IPhT a étudié le cas du réseau en nid-d’abeilles et de son correspondant aléatoire, le réseau bicubique (réseau biparti uniquement fait de vertex trivalents, et colorié en noir et blanc de sorte que les vertex d’une couleur soient reliés uniquement à ceux de l’autre couleur). Les exposants critiques du premier cas sont calculés par la méthode classique dite du gaz de Coulomb, tandis que ceux du second peuvent être obtenus numériquement avec une grande précision à partir du dénombrement exact des configurations de chemins hamiltoniens pour des réseaux de taille finie.
Ô surprise, les relations attendues de KPZ sont mises en défaut pour certains types d’exposants critiques, indiquant qu’un mécanisme nouveau est à l’œuvre qui dépasse leur cadre usuel d’application ! Un procédé (heuristique à ce stade) de renormalisation (réajustement des formules KPZ avec un nouveau paramètre) est proposé qui semble rétablir la validité de ces relations. Le défi consiste maintenant à comprendre mathématiquement comment les contraintes géométriques particulières des chemins hamiltoniens peuvent influencer la statistique du réseau aléatoire biparti, et mener à une telle renormalisation.
Référence : P. Di Francesco, B. Duplantier, O. Golinelli et E. Guitter, Exponents for Hamiltonian paths on random bicubic maps and KPZ arXiv :2210/08887 [math-ph]
Légende de la figure : Le facteur de forme (produit de la densité des parois de domaines et de la susceptibilité magnétique) est un nouvel outil pour mesurer la distance à l'équilibre. Point rouge : équilibre thermique. Point vert : trempe instantanée. Intervalle bleu : domaine de variation pour des trempes infiniment lentes.
Que se passe-t-il lorsqu'un système est refroidi très lentement à partir d'une phase de haute température et traverse un point critique correspondant à une transition de phase continue (ou du second ordre) ? Cette question a été posée par Sir Thomas Kibble en 1976, dans le contexte de la cosmologie de l'Univers primitif. Le but était de prédire la densité des défauts topologiques (des configurations de champs non-triviales, décrivant par exemple des monopoles ou des cordes cosmiques) qui subsistent dans l'Univers après que ce dernier a subi, lors du refroidissement progressif dû à son expansion, une ou plusieurs transitions de phase continues. Chacune de ces transitions diminue la symétrie des interactions fondamentales par une brisure spontanée du groupe de jauge sous-jacent.
Les idées de Kibble ont été appliquées à des problèmes de physique statistique par Wojciech Zurek quelques années plus tard. Le mécanisme de base est le même dans les deux cas. Le ralentissement critique associé à une transition de phase continue (dû à la divergence du temps de relaxation au point critique) fait que le système doit nécessairement s’éloigner de l’équilibre au voisinage de la transition. Ces idées ont donné naissance à la théorie de Kibble-Zurek qui a établi des lois d’échelle décrivant, entre autres, le comportement de la densité de défauts en fonction du taux de refroidissement.
Le mécanisme de Kibble-Zurek a été revu en profondeur par deux membres permanents de l'IPhT, Claude Godrèche et Jean-Marc Luck. Dans un article intitulé "The Glauber-Ising chain under low-temperature protocols", publié tout récemment dans Journal of Physics A: Mathematical and Theoretical, ils considèrent un modèle unidimensionnel exactement soluble, la chaîne ferromagnétique de spins d'Ising classiques
soumise à la dynamique de Glauber avec un profil de température dépendant du temps de façon arbitraire.
Le modèle possède une transition de phase continue à température nulle. Il est donc possible d'approcher de ce point critique selon différents scenarios ou protocoles en température, mais pas de le traverser, car les températures négatives ne sont pas accessibles pour des raisons physiques.
La solution analytique du modèle se simplifie largement dans le régime de basse température, où les échelles caractéristiques spatiale et temporelle deviennent beaucoup plus grandes que les échelles microscopiques, de sorte que de nombreuses quantités s'annulent ou divergent comme des puissances de la longueur de corrélation. Les auteurs ont obtenu toute une gamme de résultats nouveaux, qu'ils ont comparés à la théorie heuristique de Kibble et Zurek chaque fois que c’était possible. Ils ont calculé de façon systématique à la fois la densité des parois de domaines et la susceptibilité magnétique, qui sont toutes deux sensibles à la taille typique des domaines ordonnés de spins.
Ils proposent d'utiliser le "facteur de forme", défini comme étant le produit sans dimension de ces deux observables, comme un nouvel outil permettant de quantifier de combien l’état du système est loin de l’équilibre. En particulier, le système suit des lois d’échelle universelles dans le cas de trempes infiniment lentes, durant lesquelles la température diminue très lentement, et n'atteint le zéro absolu qu'au bout d'un temps de trempe très long, voire seulement dans la limite d'un temps infiniment long. Dans ces situations, comme le montre la figure, le facteur de forme varie continûment entre deux valeurs universelles, correspondant respectivement à l’équilibre thermique et à une trempe instantanée (c'est à dire une variation discontinue de température, entre une valeur très élevée et le zéro absolu).
Liens vers la publication :
https://iopscience.iop.org/article/10.1088/1751-8121/aca84c
https://arxiv.org/abs/2208.12512
Le jury du prix Langevin, réuni le 10 janvier 2023, a décerné à Kirone Mallick, physicien à l'IPhT, le prix Langevin 2022 de la Société Française de Physique pour ses travaux remarquables en physique statistique et concernant les processus stochastiques.
Kirone Mallick travaille à l’Institut de Physique Théorique à Saclay (CEA/CNRS) dans le domaine de la physique statistique hors d’équilibre. Spécialiste des solutions exactes, il développe des approches analytiques où les modèles d’exclusion à une dimension tiennent une place de choix. Son travail allie de façon remarquable intuition physique et dextérité mathématique. Les percées qu’il a réalisées sur des modèles paradigmatiques de la physique statistique mobilisent un arsenal de méthodes qui vont de l’intégrabilité classique et quantique, à des approches plus macroscopiques centrées sur les fluctuations ou les grandes déviations. Ses travaux sur la diffusion dite ``en file indienne’’ illustrent avec brio la complémentarité de ces différentes méthodes. Ils ont eu un véritable retentissement dans la communauté, et Kirone Mallick occupe aujourd’hui un statut incontournable à l’échelle internationale sur les questions liées aux processus stochastiques en général. Enfin, il est un enseignant lumineux, apprécié également pour son activité autour de la médiation scientifique.
Le prix Langevin récompense des travaux théoriques dans tous les domaines de la physique.
En savoir plus sur le prix Langevin
Félicitations à Kirone!
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